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Un naufrage providentiel
à Boissise la Bertrand le 16 avril 1728

"Promenez...les yeux d'un bord du fleuve à l'autre. Suivez ainsi son cours  jusqu'à Saint Fargeau, dans les demi-cercles dont il s'enlace...Quelle action sur sa surface ! Voiture-t-il donc les productions d'un monde dans un autre ? Pour combien de contrées tant de vin dont les futailles s'empilent en colline dans tous ces longs bateaux  à si larges flancs ?... (Chalumeau, administrateur du district de Melun, Ma chaumière, 1791, ADSM 8° 395.)
Dès le Haut Moyen-Age, la Seine était devenue l'axe principal de l'approvisionnement de Paris en vins de Bourgogne venus d'Auxerre ou de Chablis. L'interdiction faite aux marchands parisiens, en 1577, d'acheter à moins de 20 lieues de Paris et l'ouverture des canaux de Briare en 1642, d'Orléans en 1692, du Loing en 1723 y ajoutent un très fort trafic en provenance des vignobles de la Loire. (carte 73 K°). Mais la Seine n'est pas celle que nous connaissons aujourd'hui. Crues et décrues, inondations, roches, bancs de sable et forts courants rendent la navigation difficile. Le passage des ponts, à Melun ou à Corbeil, est une opération périlleuse malgré l'aide des "avaleurs" de pont. Mais le malheur des uns peut faire le bonheur des autres !
 

L'an mil sept cent vingt huit, le seizième jour d'avril, par devant nous, Claude Musnier, conseiller du Roy, Président de l'Election de Melun, certifions à tous que ce jourd'huy, étant à Boissise la Bertrand chez Mr le curé du dit lieu, notre frère, il nous dit que la rivière était couverte de pièces de vin. Ce qui nous a engagé de nous transporter sur le bord de la rivière où nous avons appris qu'il y avait eu naufrage de deux bateaux de vin venant du canal de Briare; ce que nous avons remarqué et reconnu par trois pièces de vin qui avaient été pêchées par différents particuliers et par quatre autres pièces qui ont été en notre présence, par le passeur de Boissettes, pêchées.

Et nous étant retiré chez le dit sieur curé, sont survenus Jean Pigoury, voiturier par eau demeurant à Pouilly sur Loire, et Etienne Duquesne, aussi voiturier par eau demeurant à St Thibaud sous Sancerre. Lesquels nous ont fait plainte qu'ayant fait naufrage au pont de Melun et plusieurs pièces étant allées au vau l'eau, ils étaient venus le long de la rivière pour reconnaître et réclamer les pièces qui auraient été pêchées. Étant parvenus à cette paroisse, ils avaient reconnu qu'il en avait été pêché sept pièces, lesquelles étaient au pillage et à la discrétion des habitants qui tiraient du vin des dites pièces et l'emportait chez eux.

Pour connaître la vérité de cette plainte, nous nous sommes transportés sur le bord de l'eau où nous avons vu et visité sept pièces de vin toutes en vidange d'un seau ou environ....Nous étant informés de ceux qui pouvaient avoir bu ou soustrait le manquant du vin des dites pièces, nous avons appris que les nommés Cachemiche, Jacques Poullain, Timothée Habert, la grosse Margot la femme de Chartrettes, le nommé Achille Tremblé et autres particuliers dont nous n'avons pu savoir le nom, en avaient emporté tant en cruches qu'en barillet.
Dont tout ce qu'au dessus nous avons fait et dressé procès-verbal pour servir et valoir ce que de raison.

Archives départementales de Seine et Marne.
Cote 35 C 54 - Texte et orthographe restitués

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