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Un siècle de reconstruction 1450-1560
Très
vite, les terres abandonnées du plateau sont réensemencées
et la vigne refleurit sur les coteaux. On remet de l'ordre dans
les titres de propriété : les archives nous ont conservé
déclarations de biens, contrats ou jugements qui dessinent
le paysage de l'époque.
" A Boillunel (1511 - la ferme de
Boulineau appartenant à l'Abbaye des Vaux de Cernay) il y a maison, chappelle, granges,
estables, court et jardins, le tout clos de murs... et avec ce,
265 arpents ou environ de terres labourables, prezs, bois, taillis
et buissons." A Tilly, en 1485, les
Chartreux de Vauvert possèdent "hostel
seigneurial contenant maison manable, granche, estables, bergeries,
court, puys et autres aisances..". A coté de ces grandes propriétés,
les hameaux abritent une centaine de "logis
où il y a four et cheminée, cave dessous, grenier
au dessus et jardin derrière", et
déjà des horsains comme ce Jean
Prugneau, marchand et bourgeois de Paris,"
qui signe, le 17 août 1497, un accord avec les Chartreux de
Tilly pour 3 arpents de vignes. A Ponthierry, il y a déjà
commerce et auberges fort animées si l'on en croit la lettre
de Louis XII, graciant en Juillet 1498, "Pierre
Pitou, habitant St Fargeau, près Corbeil, pour meurtre commis
sur la personne d'un certain Pierre Besse à la suite d'une
querelle qui s'était élevée à propos
d'un pari fait à l'auberge". !
Des chantiers s'ouvrent car il faut réparer les
dégâts des guerres ou du temps; la vieille église
de St Fargeau est d'abord remise en état. Puis, au début
du XVI° siècle, devant l'augmentation de la population,
il faut l'agrandir en lui rajoutant un bas-côté sur
le flanc nord. La circulation et le commerce reprennent sur les
routes et le fleuve..
A Tilly, les Chartreux ont "un port
sur la rivière de Seine...appelé le port aux pourceaulx,
auquel nefs et autres vaisseaux sont chargés et déchargés".
La grand route de Paris vers
Lyon et le midi avait longtemps évité la forêt
de Fontainebleau,
"repaire de fauves et de brigands." D'Essonne,
la route de la "vieille poste" obliquait, par Auxonnettes,
vers Milly et le Bourbonnais. et celle "de Bourgogne"
rejoignait, par Melun, la Table du Roi et Valvins. Mais, depuis
François 1er, les séjours de la Cour à Fontainebleau
et la mode du "Voyage en Italie" redonnent vie au vieux
pont sur l'Ecole. En 1553, le"Guide
des chemins de France" premier guide
routier français, indique "sur la route de
FontaineBelleau: Essonne, Ponthierry, Chailly"
Un temps d'épreuves 1560-1598
Les guerres de Religion vont frapper durement
la région . En 1562, les huguenots de Condé, en marche
vers Paris, assiègent Corbeil. "Le
gros de l'armée se logea aux villages circonvoisins: sçavoir,
l'avant-garde à Essonne, la bataille (corps
de bataille) à St Fargeau, l'arrière-garde à Ballancourt;
et pour dire en un mot, il n'y eut village ni hameau sur le Gastinois
qui ne fut empli de gens d'armes. (carte ).
Le séjour de ces deux armées, l'une (huguenote) en Gastinois, l'autre(catholique) en Brie fut cause
que tout le territoire de la Chastellenie de Corbeil (dont dépendait St Fargeau)
fut destruit et désolé, encore plus du côtédu
Gastinois ou il ne demeura aucun arbre fruitier debout ni maison
avec la couverture...Corbeil et son territoire demeura vuide de
tous biens qui avoient été consommés par une
si grande multitude de soldats, dont il y en eut plusieurs atteints
de peste". (Jean.de La Barre, Les
Antiquitez de la Ville, Comté et Chastellenie de Corbeil.
1647). S'ensuivent trente
dures années de désordres.
En 1590, les troupes (catholiques) d'Alexandre Farnèse, prennent
Corbeil pour dégager Paris assiégée par Henri
IV. Le même historien raconte le pillage de la région
: "Le Prince de Parme et les Espagnols
enlevèrent tous les bestiaux, vins et grains de la Brie,
de Gastinois et de la Beausse; ils fourroient tout dedans leurs
grands chariots et les portaient vendre à Paris bien chèrement
et le plat pays demeura vide et nettoyé comme au ballet (balai).Il n'y resta aucuns vivres
ni commoditez. La guerre s'éloigne
ensuite mais il faut attendre l'avènement d'Henri IV et la
signature de l'Edit de Nantes pour que la paix s'installe.
Nouveaux nobles, nouveaux seigneurs
 A
Moulignon, la vieille famille des Vaudetar a réussi à
se maintenir. Sur un mur de la vieille église, les visages
d'Adam Thiboust (†1595) et sa femme Odette de Vaudetar, Dame de
Moulignon (†1603), ont survécu à l'usure du temps.
Mais les guerres pour la défense du catholicisme coûtent
très cher aux rois de France. Pour les financer l'Eglise
est obligée, à plusieurs reprises, de vendre (avec
l'autorisation du Pape) une grande partie de ses terres.
En 1585, l'Abbé de la Charité sur Loire vend les droits
et dîmes que l'abbaye possède encore à St Fargeau
au baron de Jonville, Michel de Castelnau-Mauvissière, que ses brillants services de soldat et de diplomate
n'ont pourtant guère enrichi. D'autres ont mieux su profiter
des misères du temps ! Ce sont des familles bourgeoises de
commerçants, magistrats ou officiers royaux, aux fortunes
récentes, qui vont pouvoir acquérir terres et
titres de noblesse.. En 1597, la "Grange" de
Boulineau, qui appartient à l'abbaye des Vaux de Cernay depuis
cinq siècles, passe à la famille de Villeroy. En 1600,
les terres (en ruines, précise le contrat de vente) et la
Seigneurie de St Fargeau sont cédées, pour 2100 livres,
à Dame Gabrielle Huillier, par le Chapitre de Notre Dame
de Paris. A Tilly, les Chartreux ont laissé place à
la famille Gron: Madeleine, Dame de Tilly et Maison Rouge transmettra
le titre à son fils Nicolas Le Jay. Pour les vignerons
et laboureurs du pays, le changement n'a pas dû être
très sensible. Tous ces "maîtres" successifs
sont maintenus loin de leurs terres par leurs affaires ou le service
du Roy .
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